Dans les annales des dynasties chinoises, l'invention du papier est précisément datée de la première année de Yuan Xing (105)
et attribuée à un personnage connu, Cai Lun, haut fonctionnaire de la cour des Han.
Bien qu'il est pratiquement prouvé que Cai lun n'a pas inventé le papier, on peut lui attribuer celui d'avoir su perfectionné la technique déjà très
ancienne en dotant le papier d'une structure plus fine et plus résistante.
Ainsi mieux adapté à l'écriture.
Avant lui, le papier chinois était fabriqué à partir de fibres végétales ou de bois lacéré (chanvre, écorce de mûrier, bambou, paille de riz, bois de santal, etc.)
écrasées à l'aide d'un battoir ou d'une massue sur une dalle de pierre.
Cai Lun a amélioré la qualité de la pâte en substituant le mortier et le Pilon à la technique du battoir sur pierre et en ajoutant à la matière première des fibres tissées (selon la tradition, des fragments de chiffons, des cordages et de vieux filets de pêche, macérés dans de l'eau), c'est à dire en inventant ce que l'on appellera " le papier de chiffon ".
Le rapport de Cai Lun sur la fabrication du papier reçoit les félicitations de empereur au moment où le pouvoir central décide de développer la production du papier et d'en faire un support Officiel de l'écriture dans tout l'Empire.
C'est le symbole de cette nouvelle ère que la tradition chinoise révère dans le personnage de Cai Lun. Déifié comme dieu des papetiers, il est devenu, sous les Tang, l'objet d'un véritable culte: le mortier où, suivant là légende, il avait fait pourrir de vieux chiffons et des filets de Pêcheur a été solennellement transporté du Hunan jusqu'à la capitale Pou, être placé comme un trésor dans le musée impérial. La technique institutionnalisée par Cai Lun s'est rapidement répandue dans les provinces de l'Empire, puis en Asie Centrale et en Indochine.
Selon les ressources locales, les composants textiles sont mélangés diverses matières végétales : fibres de chanvre, écorce du mûrier groussonetia (Shu),
rotin, bambou, paille de riz ou de blé, cocons de soie, fibres de lin, jute, bois de santal, hibiscus, lianes, mousses, algues, etc.
Tsai Lun (50 - 121) ou encore Ts'ai Lun ou même quelques fois Cai Lun et encore Eao Lun, selon la prononciation.
Il est dit qu'il serait né à GuiYang,
capital de la province de Guizhou en chine. Eunuch afin de gagner un emploi au service impérial, ainsi il n'aurait pas dans l'idée de prende le pouvoir et créer
sa propre dynastie (sans enfants...)
Il a été la première personne à mentionner la méthode pour fabriquer du papier à partir des chiffons de coton et cela en 105.
Il a été remercié par l'empereur pour cette recherche sur les papiers qui a permis à la chine d'avoir une belle avance technologique vu qu'il faudra attendre
les arabes en 751 pour y avoir accès!
Mais hélàs conspiration et intrigue à la cours, font que Cai Lun va se retrouver emprisonné.
Il est dit qu'il prit un bain, puis s'habilla d'une belle robe longue et fine dû à son rang de ministre et se donna la mort en buvant un verre empoisonné.
- Après macération dans l'eau des marais et rouissage, les écorces, les végétaux et les lambeaux de chiffons sont placés dans un mortier.
- Ils sont arrosés d'eau et broyés jusqu'à ce que la matière soit entièrement défibrée.
- Pour accélérer la décomposition, on procède souvent à la cuisson alcaline des matières végétales dans une lessive de cendres.
Certaines fibres exigent un long travail de préparation :
- Pour rouir les cannes de bambou il faut d'abord un bain de cent jours dans l'eau des étangs ou des rivières,
- puis une cuisson dans une solution de chaux bouillante ou un mois de macération dans la chaux et
- enfin trois semaines de bains de vapeur entrecoupés de rinçages à l'eau claire.
- On peut ensuite procéder au broyage.
D'ordinaire les fibres sont écrasées dans le mortier à l'aide d'un pilon ou d'un maillet.
La technique archaïque de l'écrasement sur dalle de pierre reste en usage dans certaines régions
(elle s'est maintenue au japon pour certains papiers jusqu'au XIXe siècle).
Ailleurs, au contraire, on voit apparaître un début de mécanisation avec le marteau pilon:
A l'aide d'un balancier,
le papetier commande du pied la levée et la chute du pilon dans le mortier.
Pour de nombreuses applications industrielles,
la Chine possédait au XIVe siècle des moulins à eau, équipés de l'arbre à cames, aussi performants que les moulins occidentaux.
Mais cette technique, qui aurait pu facilement être adaptée au papier, n'a, semble-t-il, jamais été utilisée pour triturer la pâte :
les pilons étaient mus par le poids de l'homme quand la pâte n'était pas tout simplement triturée à la main ou au pied.
Aux dépens de la rentabilité et pour des raisons sans doute symboliques, la culture chinoise a choisi de préserver intact le lien originaire entre le papier
et l'énergie humaine.
Fin, souple, résistant et facile à rouler ou à plier, le papier de chiffon chinois devint le support idéal des tracés au pinceau lorsque fut résolu le problème de sa perméabilité.
L'art de la calligraphie consiste à maîtriser le dosage d'encre sur le papier et sa diffusion dans les fibres, et certains grands maîtres ont su jouer avec ce coefficient d'absorption de l'encre par la matière fibreuse, pour des graphismes puissants où la trace du pinceau traverse la feuille.
Les papiers évolués de l'ère Cai Lun, à fibres longues, possèdent sur ce point une qualité essentielle pour le calligraphe : une importante capacité d'absorption superficielle combinée avec un arrêt soudain de l'encre. Grâce au papier, plus léger que le bambou et moins onéreux que la soie, le nombre des manuscrits se multiplia rapidement en Chine dans des proportions considérables.
[/hide]
La bibliothèque fondée à Chang'an par Taizong (627 . 649), deuxième empereur Tang, comptait environ deux cent mille volumes, un chiffre énorme si on le compare aux quelques centaines d'ouvrages qu'abritait à la même époque la bibliothèque pontificale, en Italie.
Il s'agissait de manuscrits dont il ne reste que quelques rares spécimens originaux.
Sur le modèle des rouleaux de soie,
les premiers manuscrits de papier s'enroulaient en Volumina Quan formés de lès aux dimensions généralement standardisées que l'on collait bout à bout ; le rouleau pouvait atteindre une longueur considérable.
Aux livres manuscrits des calligraphes allaient bientôt venir s'ajouter de nouvelles générations d'ouvrages, que seul le papier permettait de produire aisément et en grand nombre : les estampages et les livres xylographiés, grâce auxquels l'art des maîtres anciens de la calligraphie a pu traverser le temps.
[hide=De nos jours, les dernières découvertes]
Vers la fin du XIXe siècle, des expéditions archéologiques occidentales découvrirent au Turkestan des échantillons de papier remontant au 1er millénaire de notre ère.
L'étude au microscope a montré que les matériaux employés pour leur fabrication se composaient de diverses fibres notamment d'écorce de mûrier et de chanvre mais que ces fibres étaient d'origine textile, c'est à dire extraites de chiffons et nullement de végétaux à l'état brut.
Cette découverte de " papier chiffon" au Turkestan fit l'effet d'une bombe dans les milieux scientifiques européens.
La stupéfaction fut à son comble entre 1885 et 1887, quand une analyse au microscope du même type, faite à Vienne par J. Wiesner et J. Karabacek,
démontra que tous les papiers égyptiens, datés de 800 à 1388, que l'on venait de découvrir au Fayoum, dans le désert égyptien,
étaient eux mêmes des papiers de linge.
Enfin, en 1911, Aurel Stein rapporte de Chine des échantillons de papiers chinois du IIe siècle trouvés dans
la Grande Muraille : ils sont de pur chiffon.
Aussitôt, la Grande Encyclopédie de Berthelot annonce comme un scoop que les anciens papiers de l'Asie et
du Moyen Orient sont " de chiffon ", en tout point semblables au " papier d'Europe " et qu'il faut donc en conclure que " c'est de Chine et par
l'intermédiaire des Arabes qu'est venue en Occident la connaissance du papier ".
Le papier que l'on imaginait européen et vieux tout au plus de six à
sept siècles, gagne chronologiquement un bon Millénaire d'histoire et s'élargit géographiquement à la moitié de la planète.
Mais on notera au passage que l'Europe ne remet en question ses prérogatives historiques sur l'invention du papier de chiffon et ne renonce à la fiction
du " papier européen " qu'à une époque où cette matière vient d'être détrônée par la découverte européenne d'un nouveau matériau à vocation industrielle :
le papier de bois, qui relègue le papier de linge au rayon des vieux accessoires pittoresques.
En accord avec les nouvelles théories, le Nouveau Dictionnaire Larousse, au début du XXe siècle,
fixe donc l'apparition du papier au IIe siècle de notre ère et attribue son origine à " Caï Lun ", inventeur du papier de chiffon,
en inaugurant une tradition encyclopédique qui subsistera jusqu'à nos jours.
L'occident contemporain ne s'offre plus le privilège imaginaire d'avoir inventé le médium de sa tradition écrite mais, à titre de revanche,
le papier se voit privé au passage de quatre ou cinq siècles de son histoire: ce demi millénaire pendant lequel,
comme le disait le père Martini et comme le prouve l'archéologie, la Chine fabriquait du papier sans chiffon, à partir de fibres végétales et
de copeaux de bois bouillis dans une lessive de cendres, c'est à dire, à y bien regarder, selon une méthode qui ressemble de très près à ce fameux papier de
bois dont l'Occident industriel aura mis plus de deux millénaires à retrouver le secret.