Washi japonais

Le Washi est le terme utilisé au japon pour désigner le papier :

waétant la dénomination chinoise pour japon shi renvoyant à la matière du papier

Ce terme n'est introduit qu'au XIXe siècle pour distinguer le washi du papier occidental et du papier chinois.
Déjà, au XVIIe siècle, Rembrandt recueillait, pour tirer des gravures, un papier dont la texture inconnue l'avait frappé et qui servait d'emballage alors à des porcelaines venues d'Orient.
Le papier a été introduit au japon au Vlle siècle et est devenu, en trois siècles, une industrie nationale : neuf provinces fabriquent du papier à l'époque Nara (708 - 806), quarante à l'époque Heian (806 - 1155). Peut-être pour oublier l'origine étrangère de cette substance si essentielle à sa culture, la tradition japonaise s'est bien vite inventé des mythes et des légendes sur l'origine du papier. D. Hunter, rapporte que dans la région d'Echizen, célèbre pour son industrie papetière traditionnelle, on parle d'un secret transmis par les dieux :

Une divinité qui avait pris l'apparence d'une femme très séduisante est un jour apparue aux villageois sur le bord de la rivière ; après avoir ôté son kimono et en avoir fixé un morceau à un bambou, la belle l'a trempé dans l'eau, pour enseigner aux habitants de la région le geste du papetier qui puise la pâte avec sa forme. Elle leur expliqua que, grâce à ce geste, leur destin allait changer : " Le sol de ce duché est pauvre mais l'eau de vos torrents est claire et pure, aussi je vous apprendrai l'art de la papeterie. Il vous fera vivre. "

C'est en 548 par la Corée, qui était alors intégrée à l'Empire chinois, que le japon fait la découverte du papier.
L'introduction du papier au japon est directement liée à l'adoption du bouddhisme comme religion d'État, en 645, par l'empereur Ternir. Le papier ainsi que les pigments, l'encre de suie et le mortier auraient été importés par un moine-médecin du nom de Doncho en 610. Ce support, utilisé au début à des fins religieuses, devient rapidement support de l'administration qui se sert du papier pour recenser la population, enregistrer les échanges commerciaux, enfin réguler le travail des fonctionnaires comme en témoignent les Règlements de l'ère d'Engi, du Xe siècle. Les Japonais ont ensuite imité puis perfectionné les procédés chinois de fabrication.
Au IXe siècle, la Papeterie impériale Kami-ya< /strong> dépend du bureau officiel de l'Administration, à Kyoto, et devient un centre d'expérimentation d'où sortent de nouveaux papiers de mûrier, de chanvre, de daphné ou de paille. Les redevances au Gouvernement sont même payées en feuilles de papier, ce qui confère à cette matière une valeur fiduciaire. Le washi est né.
Enfin le papier est adopté par l'aristocratie pour la correspondance. La blancheur et la souplesse du danshi papier de Mûrier sont vantées dans la poésie, tandis que les femmes, s'approprient le gampi un papier au toucher duveteux pour leur correspondance personnelle. Certaines fibres extraites de l'écorce du mûrier, notamment celles du kozo, sont d'une variété propre au japon : particulièrement longues et résistantes, elles fournissent un papier très spécifique.
Entre le Xe et le Xlle siècle, à mesure que les procédés de fabrication se perfectionnent l'industrie du papier se répand dans l'ensemble du pays et se généralise selon une logique propre à la culture japonaise.
La fabrication du papier, si présent dans la vie quotidienne et si essentiel pour tous, ne se concentre pas chez les japonais en unités de production spécialisées : à côté des papeteries qui alimentent les villes, le monde rural développe une production saisonnière pour ses propres besoins, et chaque ferme produit son papier au même titre que les autres tâches agricoles au cours de l'année.

Les trois fibres

Le chanvre est une fibre utilisée en chine mais les japonais la remplace rapidement par trois fibres primaires dans la fabrication du papier:

KOZO
L'écorce de Kozo (mûre) est employée dans approximativement 90% du washi fait aujourd'hui. Kozo a été, à l'origine trouvé dans le désert de montagne des îles de Shikoku et de Kyusu. C'est devenu une plante cultivée, utilisée particulièrement pour la fabrication de papier et de tissu. C'est un arbuste à feuilles caduques qui grandit à une taille de 3 à 5 mètres de tige mesurant jusqu'à 10cm de large.
Au VIIIe siècle chaque famille était tenue de faire pousser 3 plants de muriers devant sa porte.

GAMPI
Un buisson que l’on trouve dans les régions montagneuses et chaudes du Japon. Le Gampi grandit à une taille de 1,0 à 1,5 mètres de hauteur. Il a été employé comme matériel de fabrication pendant beaucoup d'années dues à la haute qualité de la fibre prise de son écorce. Le papier fini est quelque peu translucide et a une texture brillante. Le Gampi ne peut pas être cultivé, il est donc rare et le plus cher de ces trois fibres.

MITSUMATA
Un buisson qui provenait de la Chine. Mitsumata grandit à une taille de 1,0 à 1,5 mètres de hauteur. Des rouleaux anciens indiquent qu'il a été employé en fabrication du papier dès 1614. Les fibres sont plus courtes que le Kozo. Les papiers de Mitsumata ont la qualité d’être des repoussants contre les insectes.

Fabrication du papier Japonais et du washi

Au Japon, la récolte du Kozo (Broussonetia papyrifera) a lieu en Automne.
- Les tiges coupées sont mises en fagots, pour subir un étuvage d'une heure ou deux, facilitant ainsi l'épluchage de l'écorce (l'écorce se rétracte et puis se détache du bois).

- Celles-ci sont alors grattées au couteau afin d'ôter la pellicule externe noire et de dégager la partie interne blanche. C'est l'étape la plus lente du travail, elle ne peut s'opérer qu'à la main.

- Cette écorce est alors mise à tremper plusieurs jours dans l'eau courante de la rivière, afin de laver les impuretés : d'où l'importance de la qualité de l'eau : les villages qui fabriquent du papier sont pour la plupart situés en montagne près d'un torrent.

- L'écorce blanche bien nettoyée, doit alors bouillir.

- Une solution de cendres à forte teneur en soude est ajoutée, et ce n'est que lorsque la fibre est assez ramollie pour être déchirée à la main que les substances inutiles de l'écorce amidon, graisse, tanin sont dissoutes.

- Après un dernier lavage complet à l'eau courante, l'écorce apparaît blanche comme neige.


- Le battage peut alors commencer. Un battoir de bois dans chaque main (travail effectué autrefois par les femmes), la fibre est battue jusqu'à obtention d'une bouillie homogène. Cette fibre battue peut, à ce moment, prendre le nom de pâte.

- On peut alors rajoutée des pigments pour obtenir un papier coloré.

- On l'additionne a beaucoup d'eau jusqu'à remplir la cuve que l'on tamisera au travers d'une natte en bambou. Le papier japonais est alors crée.

L'originalité du washi vient de sa fabrication :
- Les fibres sont mises en suspension dans une substance à base de latex, qui sert de liant. Elles sont ensuite entrecroisées sur la forme grâce à un mouvement de va et vient imprimer au tamis. La substance obtenue est douce au toucher mais très résistante. Matière mouvante, elle garde trace des gestes du papetier: les fibres s'entrelacent et s'animent sous son action, sans se laisser dompter.
Cette technique particulière pour ordonner les fibres dans le sens voulu pour lui fiare emprisonner l'air et la déchargé de l'eau en la faisant sauté par-dessus le tamis de bambou est nommée :
nagashzuki Ce sont les moines qui deviennent maîtres dans l'art de la préparation du washi.
- Ils le battent pour le lisser, le teignent, le coupent et le montent en rouleaux, enfin le décorent d'or et d'argent. Conjointement à la construction de monastères commence la traduction, à partir du sanscrit ou du chinois, des Écritures : le Sutra de Daihannya, dont la version originale est datée de 727, est constitué de six cents livres repliés en accordéon et contient, sur du papier de kozo, les canons bouddhiques.
Parallèlement, les stupas petites pagodes ou reliquaires renfermant des formules rituelles et des images de Bouddha prolifèrent et sont reproduites par centaines de milliers sur des papiers de chanvre teints en jaune.
Le battage est de nos jours mécanisé, au risque de briser parfois trop les fibres dont la longueur fait toute la texture et la résistance du papier japonais (dans les papiers occidentaux industriels d'aujourd'hui, les fibres sont broyées si courtes que l'adjonction de colle est indispensable pour tenir ces fibres ensemble) Le papier fini peut être enduit du dosa (un mélange d'alun et animal de potassium collent qui réduit le saignement d'encre), le konnyaku (un amidon dérivé de la racine de l'Amorphopallus konjac), ou le Kakishibu (tannin de kaki). Il peut également être teint avec les colorants chimiques ou normaux ou être donné une consistance rugueuse.

- Une fois la feuille obtenue dans le tamis de bambou, elle est mise à sécher au soleil sur un chevalet. Elle sera découpée aux dimensions souhaitées et empilée.
Dès le XIVe siècle, le recyclage de papier est de mise au japon. Ils récupèrent entre autres les archives qui prennent alors bien trop de place pour en refaire une pâte. Elle s'appellera au XIe siècle le kamiyagami de teinte grisâtre et d'aspect très modeste.